Une séance de conte
Dans la région de Damaro, on récite des contes la nuit, car la journée est consacrée au travail. On dit même qu’il est dangereux de conter la journée, au risque de perdre l’un de ses parents !
Les jeunes enfants se regroupent autour d’un vieux qui conte à côté d’un feu de bois. Les contes sont souvent accompagnés de chansons que tous les enfants reprennent en chœur. Le vieux le chante d’abord une première fois et les enfants le répètent à sa suite. Le conte commence toujours par la phrase « N’toly kélen né » qui signifie « j’ai un conte ».
Les conteurs ont de vastes répertoires de contes et de chansons. Il s’adapte à son public et sélectionne les contes en fonction de l’âge des enfants. Certains sont pour les tout-petits, d’autres pour les adultes – qui sont plus longs. D’autres ont des significations que l’on comprend au fur et à mesure de la vie.
Une séance de contes peut durer très longtemps, entre deux et cinq contes pour les enfants. En conclusion des contes, il y a toujours une morale énoncée par le conteur, à visée éducative. Dans les contes, les animaux parlent : le lion (diara), le lapin (zani) qui est très rusé, l’hyène (souroukou) qui se fait toujours duper par le lapin…
Konianké :
Toly la kèladi Damaro djamanakan.
Toly la kèla sou lélô. Dini lou yé iladen na katè djômôba de bara kata ïtolomalô tolyloula. Djômôba sinikèla taléfè. Toly siaman nékèla djômôbalou kônô. Wa toly la kabèn dini si djaté souléma. Dongri miyé lala toly ïlô, djômôba wola bilalalé dini ïlalé. Sou kélén nô, kadamina toly fla kataci loloula. Toly laban bèkèla lalili kan nélé kafô dinilou gnè.
Conte – « Un enfant orphelin »
Il était une fois un enfant orphelin de père et de mère. Il vivait avec sa marâtre et ses demi-frères qui le privaient de nourriture. La méchante marâtre mangeait avec ses enfants devant l’orphelin mais ne lui donnait rien. Dieu alors montra à l’enfant un arbre fruitier (toro) quand il s’est rendu en brousse alors qu’il avait faim. Mais cet arbre-là était un peu trop haut de telle sorte qu’il n’arrivait pas à cueillir les fruits.
L’enfant alors entonna une chanson :
Abaisses, abaisses-toi, l’arbre !
Je n’ai pas mangé
Abaisses, abaisses-toi, l’arbre !
Je n’ai pas mangé depuis que mon père est décédé
Abaisse-toi
Car je n’ai pas mangé depuis que ma mère est décédée
S’il-te-plaît, abaisses-toi
L’arbre s’abaissa, et l’enfant put manger à sa guise, et l’arbre reprit ensuite sa position initiale, et l’enfant rentrait à la maison. La même chose se répéta pendant quelques jours. La méchante marâtre voyait toujours l’enfant bien portant, joyeux, fort physiquement. Elle commença à se poser la question « pourquoi ? ». Elle demande à l’enfant :
— Où manges-tu ?
— Nulle part.
— Je te demande où tu manges.
— Nulle part.
Elle commença à battre l’enfant, devant ses autres enfants. Il n’avait d’autre solution qu’à pardonner et dire :
— Allons, je vais te montrer !
La méchante et ses enfants se mirent derrière l’orphelin qui les guida jusque sous l’arbre nourricier. L’enfant dit :
— Voilà l’arbre en question. Je me nourris avec ces fruits que voici.
— Comment les obtenais-tu ?
— J’entonnais une chanson qui est la suivante :
Abaisses, abaisses-toi, l’arbre !
Je n’ai pas mangé
Abaisses, abaisses-toi, l’arbre !
Je n’ai pas mangé depuis que mon père est décédé
Abaisse-toi
Car je n’ai pas mangé depuis que ma mère est décédée
S’il-te-plaît, abaisses-toi
L’arbre s’abaissa à nouveau, la méchante et ses enfants descendirent tout le reste des fruits et elle promet à ses enfants que ces fruits-là seront le repas du lendemain. Après avoir mangé tout cela, ces fruits tuèrent tous ses enfants et il ne resta plus que la marâtre et l’orphelin. Tous les deux se mirent à pleurer pour ces morts. La méchante, affaiblie par les pleurs, décontenancée, commença à demander pardon à l’orphelin.
L’orphelin a fini par être le roi.
« Donc, si tu ne soutiens pas un orphelin, Dieu le soutiendra et gare à celui qui se mettra contre cette volonté divine ! »
Version en konianké :
N’toly kélen né, kaben feïtani kélén né ma. Dini kélé né fa sani, ka aba sa, kato aba dömani mboro ani wo dénou. Aba dömani woni adénou lété domouni kéla, kadja. Ité wélé kèla watti bè dini feïtani na.
Könko gbani dini na, ado kata walô. Allah fönoka toro djou denni djilala, amöni kössöbè wa djiridjou kadjan, dini boro técéla a dénnou ma. Dini fönöka donkiri mè la.
I madji I madji wo toro
né ma domoni kè toro
ka ta nva sala toro
né ma domouni kè toro
I madji i madji wo toro
Né ma domoni kè toro
Kata ma sala toro
Né ma domouni kè toro
I madji, i djon
Né ma domouni kè
Toro fönö ki imadji. Dini ka afata domou. Toro djou ka cékö anölö dini tè wélé kéla loulou.
Mousso djouba na ala körössila dini tola bougnèla, ka Saniya; A do ka dini kanabö, ka amagnininka.
— Iyé domouni kéla mini ?
— Yôrö si.
— Nko iyé domouni kéla mini ?
— Nko yörö si.
— Afönö ka dini gbassi damina, kofo wé adoumouni diya fö.
Gbissan gba men kéni a la, dini fönöko mousso ma ko aïdjon, ko i yé ta, a wa ayörö dila.
Mousso fönö ka aden bèta kabla dini kö, han fö alé toro djou körö.
Mousso ko dini ma, ko yé men na djila di.
Dini ko né donkiri mén né lala.
(Alé donkiri kélén : I madji I madji wo toro
né ma domoni kè toro
ka ta nva sala toro
né ma domouni kè toro
I madji i madji wo toro
Né ma domoni kè toro
Kata ma sala toro
Né ma domouni kè toro
I madji, i djon
Né ma domouni kè)
Toro kiri imadji, ïka abè ladji.
Ako a den louma kö ïkètö wélé domouna sini.
Ï fönö na wolé domouna, a den bè ka foi. A kato imö fla ma. Ïfla bè ka san kassikè. Mousso djou ka djaffa bla damina dini gnè. Dini wola ban kakè massakélé, kale mousso doni ta.
Par Ansoumane Camara et Fatoumata Doumbouya
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